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Concertation entre les acteurs du secteur du tourisme sur la fiscalité et la parafiscalité: la taxe sur les locaux loués en garni

Le mardi 21 JUIN 2022 de 11h à 14h, s’est tenue à la salle de conférence du Conseil National du Tourisme (CNT), une concertation entre les Représentants de l’Etat, les Collectivités Territoriales et les Opérateurs Economiques du secteur du tourisme (propriétaires de réceptifs hôteliers) sur la fiscalité et la parafiscalité notamment la taxe sur les locaux loués en garni.

Sur saisine de la Corporation des Résidences-Hôtels d’Abidjan (CORHA), le Secrétariat Exécutif du Conseil National du Tourisme (CNT), a invité, les différentes faitières à savoir la Fédération Nationale de l’Industrie Touristique de Côte d’Ivoire (FENITOURCI) et la Fédération Nationale de l’Industrie Hôtelière de Côte d’Ivoire (FNIHCI) et les acteurs institutionnels à une séance de travail. L’objectif est d’harmoniser les vues des acteurs du secteur public et des faitières sur les différentes dispositions portant organisation et règlementation des locaux loués en garni.

Ont pris part à cette concertation :

  • le Secrétariat Exécutif du Conseil National du Tourisme ;
  • la Direction des Affaires Juridiques et du Contentieux du Ministère du Tourisme ;
  • le Contrôleur Financier auprès du Ministère du Tourisme (Primature);
  • la Direction Générale de la Décentralisation et du Développement Local (DGDDL) ;
  • la Mairie de Cocody ;
  • le Ministère du Budget et du Portefeuille de l’Etat ;
  • le Ministère de l’Economie et des Finances ;
  • le Comité de Concertation Etat / Secteur privé (Ministère de l’Economie et des Finances , Ministère du Commerce, de l’Industrie et des PME : personne ressource) ;
  • la Fédération Nationale de l’Industrie Touristique de Côte d’Ivoire (FENITOURCI) ;
  • la Fédération Nationale de l’Industrie Hôtelière de Côte d’Ivoire (FNIHCI).

Ont été constatés absents :

  • la Direction Générale  de l’Industrie Touristique et Hôtelière ;
  • le Représentant du Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité ;
  • l’Union des Villes et Communes de Côte d’Ivoire (UVICOCI) ;
  • l’Assemblée des Régions et Districts de Côte d’Ivoire (ARDCI) ;
  • l’Association Ivoirienne de la Restauration et de l’Hôtellerie (AIRH).

La liste de présence figure en annexe.

Le présent rapport qui rend compte des conclusions de la réunion est articulé autour des quatre points suivants :

  • la cérémonie d’ouverture ;
  • le déroulement des travaux ;
  • les conclusions et recommandations ;
  • la cérémonie de clôture.
  1. Cérémonie d’ouverture

L’ouverture de la rencontre a été marquée par l’intervention du Docteur APHING-KOUASSI N’dri Germain, Secrétaire Exécutif du Conseil National du Tourisme (CNT), rapporteur de ladite séance.

A l’entame de son intervention, le Docteur APHING-KOUASSI N’dri Germain a présenté ses excuses à l’assistance pour le retard observé dans le démarrage des travaux suite à la pluie diluvienne qui s’est abattue ce jour sur la ville d’Abidjan. Il a par la suite souhaité la cordiale bienvenue aux différents participants et salué leur disponibilité à prendre part à cette session qui loin d’être une condamnation sur l’application de la règlementation sur les locaux loués en garni, se veut un creuset de conversion de vues.

Dr APHING-KOUASSI N’dri Germain a fait remarquer que cette séance de travail se tient suite à la saisine exprimée, par écrit et adressée au CNT, par le Président de la faitière FENITOURCI concernant la taxe sur les locaux loués en garni, objet de litige opposant la Commune de Cocody à la Corporation des Résidences-Hôtels d’Abidjan (CORHA).

Aussi, la présente session devrait-elle permettre aux participants, à travers les communications, les échanges de lever les équivoques et d’engager l’Administration Nationale du Tourisme, les Collectivités Territoriales et les Opérateurs Economiques du secteur dans le développement économique et social d’une Côte d’Ivoire solidaire.

Par conséquent, il a invité les participants à formuler des propositions pertinentes, qui pourraient fortement impulser sans heurt l’application des dispositions administratives, législatives, juridiques et réglementaires de la taxe sur les locaux loués en garni afin de faciliter la mise en œuvre de la politique de développement du tourisme.

Il a terminé en souhaitant de fructueux échanges chaleureux et invité les participants à s’approprier effectivement le contexte de cette rencontre afin d’être des acteurs clés non seulement pour vulgariser les conclusions mais aussi pour leur mise en application et leur suivi-évaluation.

  1. DÉROULEMENT DES TRAVAUX

II.1 Etat des lieux

La méthodologie a consisté, en plénière, à faire l’état des lieux du recouvrement de la taxe sur les locaux loués en garni.

Introduisant la première intervention, le Secrétaire Exécutif du Conseil National du Tourisme (CNT) a tenu à faire un bref rappel des missions régaliennes de concertation et de régulation assignées au CNT et invité par la suite Mme LAUBHOUET, Représentante de la FENITOURCI, porteur de la saisine, à faire l’état des lieux.

Ainsi, la résidence BERTILLE, membre de la Corporation des Résidences-Hôtels d’Abidjan (CORHA), affiliée à la FENITOURCI a porté à la connaissance des participants que : « conformément aux instructions du Ministère du Tourisme, les membres de la FENITOURCI exploitant des appartements-hôtels, ont tous obtenu leur licence d’hôteliers depuis de nombreuses années. Jusqu’à ce jour, leur licence accompagnée de leur déclaration fiscale d’existence d’hôtelier suffisait aux mairies pour les catégoriser comme hôtelier. Ainsi, ils n’étaient pas redevables de la taxe sur les locaux loués en garni.

Pourtant, la Mairie de Cocody, s’appuyant sur la note N° 2437/SEPMBPE/DGI-DLCD de la Direction Générale des Impôts (DGI), veut nous déclassifier et nous redresser en tant que loueurs en garni. En effet, il est écrit qu’au sens du dispositif susvisé, le logement meublé désigne une pièce ou un appartement garni d’un mobilier, notamment une literie, une table, des appareils électro-ménagers, du linge, des couverts et des ustensiles de cuisine, permettant une vie courante. Les loyers sont fixés par jour d’occupation du logement.

Ayant constaté depuis 2014, accompagnée d’agents assermentés des impôts, que les appartements-hôtels proposent ce genre de commodités, la Mairie de Cocody fait donc fi de nos services hôteliers et de nos diverses autorisations ».

A sa suite, Monsieur SANOGO, 5ème Adjoint au Maire de la Commune de Cocody, a présenté la communication de Monsieur le Maire de ladite commune traduite en ces termes :

« La loi N0 2003-489 du 23 décembre 2003 portant régime financier, fiscal et domanial des Collectivités Territoriales a institué, en ses articles 156 et 158, la taxe sur les locaux loués en garni, exigible de toute personne faisant profession de fournir le logement meublé. Elle est calculée sur la valeur locative réelle des locaux.

Ainsi, courant l'année 2012, les services municipaux de la Commune de Cocody ont servi des convocations et mises en demeure aux résidences-hôtels exerçant sur le territoire communal, les invitant à payer ladite taxe. Certaines résidences-hôtels, réunies au sein de la Corporation des Résidences-Hôtels d'Abidjan dite CORHA (regroupant 10 Résidences-Hôtels), ont refusé de payer cette taxe, prétextant ne pas y être assujetties.

Le 25 juillet 2013, les Résidences-Hôtels membres de la Corporation des Résidences-Hôtels d'Abidjan (CORHA) ont assigné en justice la Commune de Cocody et ont obtenu du tribunal d'Abidjan, une ordonnance de référé N0 3891 du 09 Août 2013 ordonnant la suspension du paiement de la taxe sur les locaux loués en garni, jusqu'à l'issue de la procédure de contestation de la taxe entreprise.

Cette situation a un impact négatif sur les finances de la Commune de Cocody, qui a vu son taux de recouvrement de la taxe sur les locaux loués en garni chuter de 90 %, de l'année 2012 à l'année 2021.

De surcroit, la Commune est confrontée à certains opérateurs économiques qui lui exigent le remboursement des sommes perçues au titre de ladite taxe, pour les années 2013, 2014, 2015, empêchant ainsi la réalisation de nombreux projets de développement économique et social au bénéfice de nos administrés ».

Ces deux (02) interventions ont alimenté le déroulement des travaux.

II.2 Echanges

Au regard des différentes interventions des participants, il s’avère que la problématique et les incompréhensions sur les locaux loués en garni relèvent essentiellement de la définition et des caractéristiques de cette offre d’hébergement. A cela, s’ajoute les interprétations divergentes du recouvrement de la taxe sur les locaux loués en garni tel que mentionné en l’article 158 du Code Général des Impôts.

Il faut noter que le concept « locaux loués en garni » est un emprunt du Code Général des Impôts (CGI). Selon cette source, « le local loué en garni est un logement meublé. Le logement meublé est celui garni d’un mobilier notamment un lit, une table, du linge, des couverts et des ustensiles de cuisine, permettant la vie courante ».

Pour la loi N° 2014-139 du 24 mars 2014 portant Code du Tourisme, l’on parle de meublé de tourisme et se définit comme « une chambre, un appartement, une villa ou un studio de tourisme meublé, classé, pourvu d’installations domestiques qui est offert en location à une clientèle de passage qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois mais qui n’y élit pas domicile ».

Dans la précision sur ce concept qu’apportent les faîtières et conformément à la définition du Code Général des Impôts (CGI), « la location meublée se caractérise par la commune volonté d'un bailleur et d'un locataire de louer un local garni d'un ensemble d'éléments mobiliers de nature à permettre au locataire d'user immédiatement de la chose louée et d'y vivre convenablement, c'est-à-dire doté de confort et de commodités suffisants permettant de manger, dormir et vivre décemment au regard des exigences de la vie courante. Le locataire ne bénéficie d'aucune prestation hôtelière ».

Il apparaît au regard de ce qui précède, des insuffisances et des limites terminologiques. De ce fait, un consensus sur une définition unanime des locaux loués en garni n’a t- elle pas pu se dégager au cours des échanges.

La non convergence sur la définition des locaux loués en garni a pour conséquence le non recouvrement optimal de la taxe liée à cette catégorie d’hébergement.

Selon la Mairie de Cocody, la seule profession de fournir un logement meublé est la condition pour le paiement de la taxe sur les locaux loués en garni.

Aussi, pour la Direction des Affaires Juridiques et du Contentieux du Ministère du Tourisme, cette interprétation comporte-t-elle le risque de faire peser une double imposition sur les établissements hôteliers. Il s’agit du paiement :

  • pour les établissements de plus de 10 chambres :
    •  la fiscalité nationale
    •  la taxe sur les locaux loués en garni
  • pour les établissements de moins de 10 chambres :
    • la taxe communale de l’Entreprenant
    • la taxe des locaux loués en garni.

La complexité de la question des locaux loués en garni nécessite des concertations sectorielles Public/Public ; Public/Parapublic, Privé/Privé et Public/Privé pour une meilleure compréhension de la question des locaux loués en garni dont la conséquence in fine est un recouvrement fiscal sans heurt de la taxe sur cette offre d’hébergement.

Le Secrétariat Exécutif du CNT, en organisant la présente séance de travail, a permis le repositionnement de la problématique sur les locaux loués en garni en suscitant la concertation entre les démembrements de l’Administration Nationale du Tourisme et les Opérateurs Economiques du secteur pour adresser de façon durable les conflits de compétences dans l’administration des paiements relatifs de la taxe sur les locaux loués en garni.

Dès lors, les articles de la loi N° 2014-139 du 24 mars 2014 portant Code du Tourisme doivent être accompagnés par des décrets d’application, des arrêtés, des décisions et autres textes pour une plus grande lisibilité de ce type de parafiscalité.

  1. RECOMMANDATIONS

A l’issue des travaux, les participants ont formulé les recommandations suivantes :

A l’endroit du Ministère du Tourisme :

  • prendre des décrets d’application de la loi N° 2014-139 du 24 mars 2014 portant code du tourisme pour une opérationnalisation du cadre administratif, législatif juridique et règlementaire du secteur du tourisme et de l’hôtellerie.

A l’endroit du Conseil National du Tourisme (CNT) :

  • poursuivre les concertations entre les acteurs du secteur public, parapublic et privé afin de s’accorder sur les terminologies et les caractéristiques des différents types d’offre d’hébergement ;
  • délocaliser les concertations à l’intérieur du pays afin de recueillir les préoccupations de tous les acteurs locaux intervenant dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie sur les locaux loués en garni.

A l’endroit des Collectivités Territoriales :

  • prendre une part active à la mise en œuvre de la politique de développement du tourisme (Sublime Côte d’Ivoire), réalisant ainsi le transfert des compétences pour le développement économique, social, culturel, patrimonial, environnemental, et spatial des Collectivités Territoriales.

A l’endroit des Opérateurs Economiques du secteur :

  • participer de façon significative à la mise en œuvre de la politique de développement du tourisme (Sublime Côte d’Ivoire),afin de faire du secteur privé le moteur de la croissance de l’industrie touristique.
  1. CLÔTURE

Dans son mot de clôture de la séance de travail, Dr APHING-KOUASSI N’dri Germain s’est félicité de l’atmosphère cordiale qui a prévalu tout au long des travaux.

Il a, par ailleurs, remercié l’ensemble des participants pour leur implication et la pertinence des échanges qui ont permis de jeter les bases des prochaines concertations sur les locaux loués en garni.

Il a terminé en souhaitant à l’ensemble des participants un bon retour à leurs dossiers respectifs.

Fait à Abidjan, le 21 juin 2022